A l’heure où les médias ne cessent de nous affirmer que le plus important est d’être fidèle à soi-même et d’écouter son ressenti, où certaines femmes refusent la maternité « pour sauver la planète » ou privilégient leur carrière professionnelle, où d’autres encore n’hésitent plus à affirmer regretter d’être mère, il est bon de nous rappeler qu’être mère est d’abord une bénédiction. C’est aussi une aventure personnelle pour toute la vie, une aventure en couple, avec inévitablement des écueils ! Alors, ne nous excusons pas d’être mères ! C’est l’un des thèmes abordés lors d’une récente semaine CANA Famille par Bénédicte LECALLENEC, conseillère conjugale.

Être mère, une bénédiction

Le miracle de l’engendrement, de la procréation suscite admiration, gratitude, contemplation devant l’œuvre de la nature, devant l’œuvre de Dieu. C’est un moment bascule, plein d’intensité et d’émotions. Qui ne s’émerveille pas devant la petite main ou les petits orteils d’un bébé ? Quel mystère ce petit être en devenir qui nous est confié !

Dans la Bible, la maternité est une bénédiction et le psalmiste lui-même s’émerveille :

« C’est toi qui m’as formé les reins, qui m’as tissé au ventre de ma mère ; je te rends grâce pour tant de prodiges : merveille que je suis, merveille que tes œuvres. » Ps 138-139, 13.

Et la stérilité est un vrai malheur, de Sarah à Elisabeth en passant par Rachel, Anne… On sait combien c’est une souffrance quand l’enfant se fait attendre, quand on a subi de longs traitements, ou quand il ne vient pas du tout. Un vrai parcours du combattant et l’adoption une longue aventure !

Être mère, une expérience personnelle

A l’origine, tout part d’une histoire d’amour. Puis surgit l’enfant, fruit d’une union des corps. Il est plus ou moins programmé, plus ou moins accepté, ou encore il arrive comme une surprise… Mais il est là.

Ce que je vis personnellement c’est que l’enfant vient prendre de la place dans mon corps, dans ma tête, dans mes projets. Il m’envahit. Je le nourris de mon corps, de mes caresses, de mes mots doux, mais aussi de mes émotions tumultueuses. Il perçoit tellement de choses en moi ! Ce qui est très particulier c’est que j’accueille un étranger en moi. Je suis en relation avec lui sans pour autant l’avoir vu. Mon intérieur ne m’appartient plus. Je suis habitée. C’est une expérience intime unique. Je me donne totalement. Dans cette aventure de la grossesse, j’y laisse beaucoup de mon énergie, de mon temps, de ma santé, de ma silhouette, de mes projets perso… Je me sacrifie en quelque sorte. « Voici mon corps, livré pour toi ! »

Oui, nous les mères nous sommes prêtes à donner beaucoup, à renoncer à une part de notre liberté en nous mettant au rythme de ce petit, en nous mettant à son service.

Toute la question est : quel sens à donner à ce don, ce « sacrifice » ? Est-il subi ou consenti ? Pour quoi ? Se sacrifier par amour ? Quelle est sa portée plus large ? La fécondité au-delà de l’enfantement : n’est-ce pas contribuer à ce que chacun donne sa parole pour le monde et lui apporte sa contribution ?

Ce don de soi, n’est pas si évident. Il dépend aussi de nos histoires personnelles. A-t-on fait l’expérience de l’amour inconditionnel de nos parents ou d’une personne de substitution ?

Être mère, une affaire de femmes

Nous sommes mères à la suite d’une multitude de mères. C’est rassurant. C’est possible. Nous sommes unies dans cette aventure, au-delà des époques et des cultures. On voit bien cette complicité entre les femmes, dans l’histoire du peuple hébreu autour du « sauvetage » de Moïse : les sages-femmes, la fille du Pharaon, la mère de Moïse… On voit bien cette solidarité féminine pour défendre coûte que coûte la vie, le plus faible. On parlera d’instinct maternel ? D’instinct de survie ? Il y a un « combat pour la vie » à mener, un souci qui est inscrit en chacune.

Il y a un siècle, plusieurs générations vivaient sous le même toit. On n’était pas seule à élever un enfant. Il y avait les grands-mères, les tantes, les cousines et les voisines aussi. Aujourd’hui dans de nombreux pays, la femme est très seule avec ses questions, ses angoisses, ses difficultés (même si le père est très présent). Est-ce qu’on va être capable ? Est-ce qu’on va réussir à tout concilier ? Le soutien n’est pas toujours au rendez-vous !

Être mère, une aventure pour mon couple

« Ok, j’ai eu besoin de mon mari pour concevoir. Mais quand même, je suis la mère, j’ai porté ce petit, je sens ce dont il a besoin, je sais ce qu’il faut faire ! Et quand je ne sais pas, je suis capable de trouver la solution quelque part. » Et ce n’est pas seulement quand l’enfant est bébé, cette réaction peut durer des années !

Or le père a vraiment besoin qu’on l’accompagne à devenir père, lui qui n’a pas porté l’enfant, qui n’a pas vécu la même intimité avec l’enfant. Il nous faut croire qu’il reçoit la grâce d’être père, d’être gardien de ce jardin qu’est notre famille.

L’enjeu pour nous les mères, c’est de laisser la place au père. C’est lui qui coupe symboliquement le cordon, qui sépare la mère de l’enfant, qui l’ouvre au monde extérieur. Il nous faut sortir de cette symbiose qui était bien nécessaire les premiers mois de la vie du bébé, mais qui ne doit pas durer ! Il nous faut renoncer à la fusion. Mais c’est si difficile de lâcher ! Où est la bonne distance ?

La maternité vient bousculer notre vie de couple. En tant que mère, nous mettons parfois de côté notre mission d’amante, d’épouse aimante. La maternité peut nous détourner de notre conjoint. L’homme peut alors se sentir seul ! Les dialogues sur ce sujet sont très importants pour que chacun puisse exprimer ses émotions, ses besoins, ses attentes notamment dans le domaine de l’intimité physique. Chez certains couples, quand les enfants sont là, toute leur énergie devient peu à peu centrée sur les enfants et le travail. Ils ne prennent plus de temps pour leur propre couple !

Avec de nombreux écueils

Dans cette situation si particulière, de nombreux écueils surgissent. Il vaut mieux en être conscients, non pour culpabiliser mais pour se convertir ! Par exemple, la tentation de la toute-puissance, du contrôle, le perfectionnisme, le culte de la performance, se centrer sur soi-même, l’inquiétude, le découragement, la déception, la démission de son rôle de mère et la fuite dans le travail ou dans des lieux plus gratifiants que la famille…

Comment y faire face ? Heureusement à chacun de ces écueils, des remèdes sont à notre portée. Ils sont essentiellement centrés sur l’attention portée à l’unité avec le conjoint, la simplicité, la confiance, l’intercession, le ressourcement, l’acceptation de ma réalité, de mes limites et de celles des autres, le courage, etc…

Bénédicte nous donne ce précieux conseil : « A chacune de repérer le piège dans lequel vous tombez le plus fréquemment, et de choisir le prochain plus petit pas possible. Il s’agit d’être créative pour trouver votre manière d’être mère en vous laissant conduire par l’Esprit Saint, jour après jour. »

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« Les mères sont l’antidote le plus fort à la diffusion de l’individualisme égoïste… Très chères mamans, merci, merci pour ce que vous êtes dans la famille et pour ce que vous donnez à l’Église et au monde. » La Joie de l’Amour. Pape François. AL 174

« C’est la femme qui « paie » directement le prix de cet engendrement commun où se consomment littéralement les énergies de son corpsIl faut donc que l’homme ait pleinement conscience de contracter une dette particulière envers la femme, dans leur fonction commune de parents. » Saint Jean-Paul II