Parents d’adolescent, qui ne s’arrache pas les cheveux en regardant son enfant prostré sur son lit à regarder son petit écran pendant des heures ? Que faire ? Comment se former pour une éducation à la liberté ?
Ce cher téléphone !
Qui d’entre nous parents d’adolescent ne s’arrache pas les cheveux en regardant son enfant prostré sur son lit à regarder son petit écran pendant des heures ? Qui ne l’a pas menacé de supprimer ce cher objet si son jeune ne s’en dessaisit pas volontairement au bout d’un temps convenu ?
…Et qui d’entre nous ne s’est pas entendu répondre que nous l’utilisons également beaucoup trop, sous prétexte de travail, emails ou accès à l’information ?!
En France et dans de nombreux pays, l’inquiétude grandit face à ce phénomène d’addiction à l’écran que les réseaux sociaux s’emploient activement à faire grandir. A tel point que le Sénat va lancer début mars une commission d’enquête sur le réseau social chinois TikTok, très populaire chez les jeunes, et que « certains chercheurs qualifient de ‘drogue numérique’ » selon un article de Mélinée Le Priol du 15 février 2023 dans le journal La Croix.
De son côté la Commission Européenne a lancé ce 7 février la 20ème édition de la journée internationale pour « un Internet plus sûr, sans crainte – Safer Internet Day ». C’est un rendez-vous annuel de sensibilisation aux usages du numérique à destination des jeunes, des familles et de la communauté éducative et qui dure tout ce mois de février.
A cette occasion à Paris, lors d’une rencontre entre représentants français des géants du numérique (Google, Meta, Twitter, etc.) et des adolescents, l’étonnement a été grand devant la réaction des jeunes qui revendiquent plus de protection et une aide à quitter une forme de dépendance face aux réseaux sociaux, et en particulier celui de TikTok. Ce réseau social est fréquenté chaque mois par un milliard de personnes – dont la moitié des jeunes Français âgés de 8 à 11 ans (1)
Certains d’entre eux choisissent volontairement de désinstaller l’application de leur téléphone pour ne pas tomber dans une dépendance qu’ils comparent aussi addictive que la cigarette. En effet la succession de vidéos ultra-courtes proposées sans fin favorise la sécrétion de dopamine, qui génère une sensation de plaisir et un abandon hypnotique. Derrière cela s’enchaînent les troubles du sommeil et de la mémoire, tandis que la concentration se réduit, ce que nombre de parents ou professeurs observent chez les jeunes (ou moins jeunes).
Chacun peut bien sûr paramétrer l’application pour limiter les notifications ou le champ de propositions ou le temps de consultation mais nous savons tous combien cela est difficile et demande de la détermination à mettre en place.
L’utilisation d’algorithmes de recommandation, particulièrement efficace sur TikTok, cherche à générer chez l’utilisateur le plus fort désir compulsif de rester derrière l’écran : le temps passé sur chaque vidéo, en quelques minutes, les renseigne suffisamment sur les goûts de l’utilisateur afin de lui proposer des contenus « d’amis » virtuels choisis avec la rigueur mathématique plus que le goût du partage ! « L’humanité regarde chaque jour l’équivalent de plus de cent mille ans de vidéos sur TikTok, et 95 % d’entre elles sont recommandées par algorithme », selon l’ingénieur Arthur Grimonpont.(2)
Tout commence gentiment par des vidéos ultra-courtes ludiques puis peu à peu conduit insidieusement la personne à visionner des contenus moins ajustés dont elle se défait avec beaucoup de difficulté (préjugés genrés, troubles de l’alimentation, violence…) car les algorithmes ont bonne mémoire explique RahafHarfoush, anthropologue numérique et membre du Conseil national du numérique (France).
Alors, nous parents comment faire ?
Nous savons combien il est difficile d’accompagner nos jeunes dans l’utilisation de leur téléphone. Outil précieux pour la communication et l’accès à l’information par l’accès à Internet il est aussi le lieu où des contenus nocifs sont rendus accessibles le plus facilement du monde.
Quelques pistes pour commencer :
- Limiter le temps d’exposition aux écrans : l’enjeu n’est pas de définir un temps limite de façon autoritaire et unilatérale mais d’impliquer l’enfant dans un processus d’autorégulation, afin de les aider à devenir responsable et leur apprendre à gérer la durée d’accès, notamment la nuit pour les adolescents !
- S’intéresser à la pratique numérique de ses enfants en engageant avec eux un dialogue et en les accompagnant dans leurs découvertes. En les aidant à développer leur sens du discernement dans le choix des programmes et jeux.
- Utiliser les écrans pour développer leur créativité en orientant ses enfants vers des activités de création (apprendre à dessiner, à faire des photographies, des origamis…)
- Donner le bon exemple en s’imposant également une autodiscipline : l’exemple parle mieux que mille discours ! Pensez à vous déconnecter le soir à la maison, ou à table en famille, pour votre bien et celui de vos enfants !
- Emissions, téléréalité : il peut être judicieux d’en visionner un épisode avant d’en parler avec l’enfant pour décider ensemble s’il est bon qu’il la regarde. Se mettre d’accord sur le temps et la fréquence.
- Veiller à préserver dans l’agenda familial des moments sans connexions extérieures
- S’il y a transgression de la règle l’adulte peut décider d’une sanction temporaire et prendre le temps de reparler de la règle décidée avec son jeune.
- La possession et l’usage des appareils électroniques ne sont pas un « droit » que le jeune peut imposer. Il est bon de discuter de l’intérêt de s’équiper (et clarifier nos opinions).
- Aider le jeune à trouver les moyens de participer à l’effort financier dans l’achat du téléphone, par exemple. C’est un bon moyen d’apprendre à économiser et de se sentir plus responsable.
- Se souvenir que chez l’adolescent le dialogue est souvent plus formateur que l’ordre quand il s’agit d’éduquer le regard. L’adulte reste responsable s’il y a danger et l’enfant doit apprendre que la vigilance parentale est motivée avant tout par leur sécurité. Instaurer le dialogue le plus tôt possible est d’autant plus important qu’en grandissant l’ado perçoit ce suivit comme une forme d’intrusion !
- L’apprentissage de la confiance et la recherche conjointe de solutions restent notre meilleur atout pour guider notre jeune à devenir capable et autonome.
Mais quand cela devient trop difficile : Comment éduquer nos enfants sans tout interdire ou sans laisser tout faire surtout lorsque l’on travaille à plein temps, parents en couple ou seul ? Comment en parler entre nous, chercher du soutien sans honte ni préjugé quand l’enfant tombe dans l’addiction ou que le lien de la communication devient trop tendu avec lui, ou entre nous ?
CANA Parents comme lieu de resourcement et de parole
CANA porte ce souci du couple et de la famille depuis de longues années. La proposition est faite sous la forme d’un parcours de soirées ou de rencontres entre parents pour se former, parler et trouver un soutien fraternel dans la recherche du meilleur dans l’éducation.
CANA PARENTS offre lors de ces temps entre adultes, d’aborder un certains nombres de sujets : comme la mise en place de moments de qualité entre nos jeunes et nous, la résolution de conflits, l’exercice d’une autorité ajustée, l’accès au numérique…
Chaque culture reconnaitra ses richesses et aussi ses pauvretés à faire connaitre ou dénoncer pour que les adultes de demain, que sont nos jeunes, soient outillés pour discerner et poser des choix libres.
La prière pour chacun de nos enfants est aussi une belle « arme » efficace pour les confier à Jésus et nous en remettre nous aussi à l’Esprit Saint dans les moments trop difficiles. L’alliance de la formation, de l’utilisation d’outils pédagogiques, du partage en vérité de ce que nous vivons et de la prière est un fondement pour cette belle mission de la transmission de l’amour et de l’éducation à la liberté.
Notes :
(1) 54 %, selon une étude de l’association Themis en 2021. TikTok est pourtant interdit aux moins de 13 ans.
(2) selon l’ingénieur Arthur Grimonpont. Algocratie. Vivre libre à l’heure des algorithmes, Actes Sud, 22 €.
Pour aller plus loin :