Dans son article intitulé « Amoris Laetitia, sous l’inspiration de la Parole de Dieu », l’auteur exégète et théologienne Anne-Marie Pelletier cherche à montrer combien l’exhortation apostolique du Pape François, Amoris Laetitia, véritable travail spirituel basé sur les Écritures, est porteur d’une puissance d’inspiration et d’un renouvellement spirituel suscité par la Parole de Dieu. Ainsi, l’accompagnement, le discernement et l’intégration auxquels le pape invite l’Église dans cette exhortation sont le fruit de la sagesse de Dieu dévoilée dans les Écritures. Dans un accompagnement pastoral, la prise en compte de situations singulières reflète ainsi chaque moment et chaque personne jalonnent le récit biblique. Anne-Marie Pelletier montre finalement qu’au cœur de cette exhortation, le pape nous expose le fruit de son propre compagnonnage avec la Parole de Dieu.

Dans un premier temps, montrant combien Amoris Laetitia est une véritable immersion dans les Écritures, l’auteur souligne comment l’exhortation entraîne à la fréquentation des Écritures. Anne-Marie Pelletier n’oublie pas de citer Amoris Laetitia 22 présentant la Parole de Dieu comme une « compagne de voyage » montrant le but du chemin aux familles. Au sein de cette partie, l’auteur part de l’étendue des Écritures citées dans Amoris Laetitia, notamment toute la littérature sapientielle. Cette sagesse permet au discours de garder « les pieds sur terre » comme le dit la préface d’Amoris Laetitia. La réalité du couple et de la famille devient donc l’« histoire de la chair avec Dieu » et peut s’ouvrir à la complexité du réel. L’auteur nous amène à la prise en compte d’une vérité incarnée.

Dans un second temps, Anne-Marie Pelletier présente Amoris Laetitia comme un appel à reconnaître les « lieux » de Dieu et son œuvre de salut. Les « lieux » de Dieu sont les brèches où Dieu se rend présent. De la triangulation fondatrice de Genèse 2 à l’altération pécheresse de Genèse 3, le pape ose évoquer « un chemin de souffrance et de sang » (Amoris Laetitia 19). Mettant en lumière les obscurités des couples et des familles, le pape François s’appuie sur la présence de Dieu dans les histoires chaotiques. L’espérance de l’Évangile est que le chemin de la révélation passe par des réalités humaines difficiles : Anne-Marie Pelletier nous montre que c’est par ces relations problématiques que passe l’« histoire sainte ». Ainsi, l’« hôpital de campagne » (Amoris Laetitia 291) dont aime parler le pape François n’est rien d’autre que l’humanité des Écritures.

Enfin, dans un troisième et dernier moment, l’auteur aborde l’articulation de la loi et de la miséricorde comme un chemin d’accueil de la Bonne Nouvelle de l’Évangile. Affirmant qu’il est vain de redire la loi là où elle est méprisée ou rejetée, l’auteur montre l’urgence à rendre un accès au sens de la loi que désigne l’Église. L’identité de la loi est d’abord un don divin au service de la vie et du bonheur, il faut donc l’identifier dans la plénitude de son identité révélée dans le Christ. Faire la vérité reste un acte vital mais la miséricorde de cette identité christique nous amène à un accompagnement et une intégration, œuvres de la miséricorde divine. L’amour encadrant la loi comme son préalable et son dépassement, peut alors se manifester en vérité.

Présentant Amoris Laetitia dans la continuité de la centralité matricielle de l’Écriture dans l’intelligence du mystère chrétien évoquée dans la constitution dogmatique Dei Verbum, l’auteur montre petit à petit que l’exercice d’accompagnement, de discernement et d’intégration proposé par le pape François au sein de l’exhortation est finalement le fruit de la sagesse de Dieu dévoilée dans les Écritures. Amoris Laetitia se révèle comme une pastorale des couples et des familles « Évangile en main ». Pour ceux qu’Amoris Laetitia questionne par une audace déconcertante, Anne-Marie Pelletier montre que les mots de l’exhortation viennent tout droit de l’Évangile et amènent « la joie de l’amour » comme une possibilité toujours ouverte !